L’impôt à la source est entré en vigueur le 1er janvier 2019. Déjà en application dans de nombreux pays d’Europe, sa mise en place vise à uniformiser et à rendre plus facile le prélèvement de l’imposition. En quoi consiste le prélèvement à la source ? Sur quelle décision a-t-il été déployé ? Quel est son impact sur les contribuables ? Vous trouverez les réponses au fil de cette page.
Qu’est-ce que l’impôt
à la source ?
Le prélèvement à la source est une mesure dont le fonctionnement est similaire à celui des cotisations classiques. Il permet d’étaler l’imposition sur plusieurs mois, contrairement à la méthode traditionnelle qui contraignait le contribuable à tout régler en une seule fois. Une définition du prélèvement à la source
L’impôt à la source consiste à prélever l’imposition du contribuable en même temps qu’il reçoit ses revenus, par l’intermédiaire d’un tiers payeur.
Dans le cas des travailleurs indépendants, des agriculteurs ou des personnes percevant des ressources foncières, l’imposition est prélevée via des acomptes, directement par l’administration fiscale. Pour les salariés ou les retraités, les prélèvements sont effectués par l’employeur ou par la caisse de retraite. L’existence du prélèvement à la source ne signifie pas qu’il n’est plus nécessaire de déclarer ses revenus à l’Etat. Chaque année, il demeure obligatoire de remplir sa déclaration.
Qui a décidé
cette mesure ?
Le prélèvement à la source n’est pas un projet récent en France, puisqu’une première tentative eut lieu en 1939 sous l’appellation de « stoppage à la source ». Cette mesure a été abolie après la Seconde Guerre Mondiale, en 1948. Si l’idée a été par la suite soulevée à plusieurs reprise, ce n’est qu’en 2016 sous la présidence de François Hollande qu’elle est finalement inscrite dans la loi de finances pour 2017. Initialement prévu en 2018, le prélèvement à la source est décalé à 2019. Mais dès l’année 2018, une simulation du montant de l’imposition et du revenu net figure sur la fiche de paie des salariés d’entreprises pilotes.
Comment fonctionne
ce mode d’imposition ?
Le prélèvement à la source s’applique aux revenus du contribuables : salaires et traitements, chômage, pensions de retraite, part imposable des indemnités de licenciement et indemnités de maladie. Cela concerne également les revenus fonciers et ceux des travailleurs indépendants, ainsi que les pensions alimentaires.
Salaires et ressources assimilées
Le montant de ce qui est prélevé, dans le cas des salaires et des traitements, est mentionné directement sur la fiche de paie.
Concrètement, l’administration fiscale calcule un taux selon lequel les prélèvements sont effectués par l’employeur ou tout autre type de collecteur. Il est possible de modifier ce taux sous certaines conditions au cours de l’année, si le foyer fiscal connaît un changement de situation. La mise en place du prélèvement à la source met fin aux acomptes et à la mensualisation.
Travailleurs indépendants, ressources foncières et pensions alimentaires
Avec le prélèvement à la source, la trésorerie nationale prélève certains revenus sous la forme d’acomptes directement sur le compte bancaire du contribuable. Il s’agit des bénéfices commerciaux, agricoles et non commerciaux, des pensions alimentaires, des ressources de viager, ainsi que des revenus fonciers et d’origine étrangère mais imposables en France.
Les prélèvements s’effectuent de manière mensuelle ou par trimestre, et sont calculés à partir de la déclaration d’impôts.
Que faire en cas de changement de situation familiale ?
Il est impératif de signaler tout changement de situation familiale dans les 60 jours qui suivent, afin que le taux d’imposition soit recalculé par l’administration fiscale. Cela concerne les situations suivantes :
- Mariage et Pacs
- Naissance, adoption ou recueil d’un mineur
- Décès d’un des membres du foyer fiscal
- Divorce et clôture de Pacs
Taux personnalisé et non-personnalisé
Deux options sont possibles afin de faire face ou non à des situations particulières au sein d’un foyer fiscal, à savoir l’application d’un taux personnalisé ou d’un taux non-personnalisé. Le taux personnalisé permet de prendre en compte les disparités des revenus au sein d’un couple. Le taux des prélèvements est alors individualisé. Cela permet de ne pas avoir un taux unique s’appliquant aux deux conjoints.
Le taux non-personnalisé offre la possibilité aux salariés de ne pas transmettre leur taux individualisé à leur employeur. Cette option n’est intéressante que s’ils disposent de revenus importants en dehors de leurs salaires, et qu’ils ne souhaitent pas que leur employeur en prenne connaissance. Ceci afin d’éviter d’influer sur les choix de ce dernier en matière de politique salariale au sein de l’entreprise. Ce taux non-personnalisé n’est calculé qu’en fonction de la rémunération versée par l’entreprise, sans prendre en compte la situation familiale du salarié.
Quels changements implique
le prélèvement à la source concernant
les impôts sur le revenu ?
Avec les impôts à la source, il est légitime de se demander si des changements profonds risquent de survenir dans la manière de calculer ou de prélever les sommes dues à l’Etat. Il s’avère bien souvent que ces modifications sont minimes.
Les revenus fonciers
Comme évoqué précédemment, les revenus fonciers sont également soumis aux impôts à la source. Néanmoins, contrairement aux salaires qui font l’objet d’une retenue par l’employeur, des acomptes sont prélevés directement par l’administration fiscale par mois ou par trimestre.
Le montant de ces acomptes est calculé sur la base des revenus fonciers imposables de l’année précédente. Les revenus fonciers sont retenus pour leur valeur nette après que soient comptabilisés les travaux et les charges déductibles, ainsi que le déficit reporté des années précédentes.
Les acomptes peuvent être prélevés jusqu’au 15 de chaque mois, ou bien des mois de février, mai, août et novembre dans le cas des échéances trimestrielles. L’administration fiscale n’en tient pas compte si leur valeur est inférieure à 5 euros.
Il est par ailleurs possible aux propriétaires bailleurs de mettre fin aux prélèvements des acomptes s’ils cessent de percevoir leurs loyers. Dans ce cas, l’arrêt définitif survient dans le mois qui suit le moment de la demande.
La flat tax
Le Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU), aussi appelé flat tax, concerne les revenus issus des capitaux et impose un taux unique de 30%. Il cohabite désormais avec le prélèvement à la source, mais n’est pas directement concerné par celui-ci. En d’autres termes, aucun changement n’est à prévoir concernant les modalités de déclaration ou de calcul.
La CSG
La Cotisation Sociale Généralisée (CSG) contribue à financer la protection sociale en France. Elle concerne notamment les revenus du patrimoine et du capital.
Depuis 2019, les acomptes concernant les revenus des loyers et des rentes viagères à titre onéreux sont directement prélevés sur le compte bancaire du contribuable par l’administration fiscale. Les contributions sociales s’appliquant aux ressources issues des loyers ou des rentes viagères sont prélevés au taux de 17, 2%.
En 2019, les bénéficiaires de revenus fonciers sur l’année 2017 ont donc dû verser un acompte portant à la fois sur les cotisations sociales et l’impôt sur le revenu.
Qu’est-ce qui
ne change pas ?
Les modalités de calcul de l’imposition demeurent inchangées :
- Le barème reste progressif, cela signifie que les tranches d’imposition sont de plus en plus élevées à mesure que les revenus du foyer fiscal augmentent.
- La conjugalisation (liens conjugaux) et la familialisation (liens familiaux) sont conservées.
- La totalité des ressources du foyer fiscal sont toujours pris en compte.
- L’avis et la déclaration d’impôts sont conservés.
- Réductions, abattements et crédits d’impôts sont maintenus.
Les réels changement s’opèrent donc globalement au niveau des modalités des prélèvements, qui s’appliquent désormais en retenue des revenus.
Le prélèvement à la source et l’année blanche : sur le principe
En pratique, l’année blanche 2018 n’en est pas vraiment une. Les impôts de 2017 ont été payés en 2018, tandis que les impôts de 2019 ont été payés en 2019. Il n’existe donc pas d’année sans impôt, puisque tous les ans voient survenir des prélèvements.
Néanmoins, les impôts de 2018 ne seront jamais payés, ce qui lui vaut d’être qualifié de prélèvement à la source en année blanche. C’est l’instauration du crédit d’impôt de modernisation du recouvrement
(CIMR) qui aura rendu possible cette année blanche, à l’exception des sommes surérogatoires. Ces revenus exceptionnels ont été imposés normalement. Il s’agit de sources de revenu telles que les primes de départ en retraite, la participation ou encore des primes extralégales de licenciement. Le contribuable ne pourra toutefois en sentir l’impact qu’au moment de son départ en retraite. En effet, alors que la méthode traditionnelle calculait l’imposition sur l’année précédente, l’arrivée des impôts à la source la recalibre sur l’année en cours.
Si par le passé, lors de leur première année, les retraités devaient payer un impôt calculé sur leur dernière année d’activité, ce ne sera plus le cas désormais. Grâce au prélèvement à la source, ils paieront une somme plus en accord avec la diminution de leurs revenus, ce qui représente une amélioration intéressante.
Quels sont les inconvénients
de cette mesure ?
Le prélèvement à la source pose un certain nombre de problèmes qui ont été soulevés par ses opposants avant sa mise en œuvre, et qui continuent d’être avancés :
- La vie privée est mise en question, car l’employeur est désormais celui qui a la charge de récolter l’imposition. Il doit donc être en mesure de récolter des données et des informations personnelles sur ses salariés, tels que ses ressources émanant du patrimoine ou du conjoint, ou encore leur situation familiale et leurs changements situationnels. Le salarié peut tout à fait souhaiter ces informations pour lui et conserver un certain degré de confidentialité.
- L’un des objectifs du gouvernement est de simplifier les procédures d’imposition, mais le risque en adoptant une telle méthode est de semer la confusion parmi les contribuables. Le changement peut apparaître au contraire plus complexe, d’autant plus parce qu’il demeure nécessaire de réaliser sa déclaration annuelle.
- D’autre part, et il s’agit de l’une des raisons qui ont repoussé aussi longtemps l’adoption du prélèvement à la source, l’acceptation des contribuables doit être prise en compte. Le fait de voir son salaire amputé des impôts sur le revenu sur une base régulière risque d’avoir un impact politique négatif. Le résultat est identique à la méthode précédente, mais l’influence psychologique de cette méthode est essentielle.
- Pour les employeurs, cela représente une charge de travail supplémentaire, ainsi qu’un coût. Il s’agit en effet d’une démarche supplémentaire assumée par les entreprises au sein des processus fiscaux déjà compliqués. Cela pourrait par ailleurs constituer un frein supplémentaire à l’esprit d’entrepreneuriat dans l’Hexagone.
- Il est de notoriété publique que la principale fraude des entreprises concerne la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Or, l’instauration du prélèvement à la source repose sur un principe similaire, puisqu’il s’agit de prélever l’imposition retenue sur les salaires. Cela représente un risque pour l’Etat, qui doit mettre en place des organes de contrôle et assumer des coûts de fonctionnement supplémentaires.
Il existe donc un certain nombre d’inconvénients et de zones d’ombre à prendre en compte lorsque l’on évoque le prélèvement à la source. Toutefois, ces faiblesses sont censées être compensées par les bénéfices escomptés par l’Etat.
Quels sont les objectifs de l’Etat
en choisissant cette méthode ?
L’un des premiers atouts des impôts à la source est la réduction du décalage d’un an entre les déclarations et les versements. Désormais, les contribuables paient pour l’année en cours, et les changements de situation sont pris en compte plus rapidement et de manière beaucoup plus efficace. C’est la raison pour laquelle il existait déjà depuis longtemps dans d’autres pays d’Europe et d’autres zones du globe.
Quels sont les pays
ayant déjà adopté cette mesure ?
La quasi-intégralité des pays développés appliquent le prélèvement à la source depuis longtemps. Il n’y a que la Suisse et Singapour qui ne sont pas concernés. En Amérique, en Europe et en Océanie, le prélèvement à la source est désormais la règle. En Asie, l’Inde a notamment adopté cette réforme. En d’autres termes, le prélèvement à la source est très répandu, il s’agit d’une mesure sur laquelle la France a longtemps été en retard. L’adopter est le moyen de se mettre à jour et de s’aligner à l’international.
Comment l’imposition s’adapte-t-elle
à la vie du contribuable ?
En ayant recours à la méthode d’imposition traditionnelle, les impôts étaient perçus l’année suivante par rapport à l’année de perception des revenus. Cela occasionnait donc un décalage dont les répercussions pouvaient être négatives sur la trésorerie du contribuable. En effet, au cours d’une année, les changements pouvant survenir dans les situations familiales, professionnelles et foncières d’un foyer fiscal sont nombreuses. D’une part, les unions matrimoniales, les naissances, les divorces et les décès constituent autant d’événements susceptibles de modifier l’imposition.
D’autre part, que l’on soit salarié ou indépendant, la vie active évolue de manière constante, et un an représente une longue période durant laquelle de nombreux événements peuvent survenir :
- Arrivée dans la vie active
- Création d’entreprise
- Mutation professionnelle
- Changement de poste
- Augmentation de salaire
- Perte d’un emploi
- Départ en retraite
- Congé sabbatique
- Création d’entreprise
- Fluctuations de l’activité professionnelle
Enfin, les propriétaires bailleurs peuvent quant à eux faire face à des loyers impayés, des charges exceptionnelles ou encore à des changements de locataires. Autant de changements qui nécessitent d’être pris en compte dans le calcul des impôts. Pour l’Etat, le prélèvement à la source est le moyen de répondre à cette problématique.
Comment les impôts retenus profitent-ils
d’une meilleure répartition à l’année ?
Même dans le cas d’une situation stable, l’imposition demeurait irrégulière avant la mise en place du prélèvement à la source. En effet, les paiements s’effectuaient soit sur dix mois de janvier à octobre dans le cas de la mensualisation, ou bien par tiers prévisionnel. La mise en place des impôts à la source change la donne.
Les prélèvements sont effectués en même temps que la perception des revenus. Ils sont donc étalés sur les douze mois de l’année, s’adaptant de manière immédiate et automatique aux montants réellement perçus.
Pourquoi les changements de situation
sont-ils mieux pris en compte ?
Tous les ans, un peu moins d’un tiers des contribuables connaissent une diminution de leurs revenus et doivent donc payer des impôts qui ne correspondent plus à leurs ressources réelles. Il peut s’agir d’une baisse subie (perte d’emploi), choisie (formation, création d’entreprise), ou de la conséquence d’un départ en retraite.
Les impôts à la source prennent ces changements en considération de manière immédiate, et les taux sont adaptés en conséquence :
- Pour les revenus salariaux, le taux de prélèvement est appliqué chaque mois aux ressources perçues par le salarié. Les montants prélevés suivent l’évolution des salaires. Un changement de situation menant à une variation significativeon de l’imposition peut entraîner une mise à jour du taux de prélèvement en cours d’année.
- Il en va de même en ce qui concerne les revenus perçus par les indépendants et les agriculteurs. La naissance d’un enfant, la variation du cours des produits agricoles ou encore la perte de clients permettent donc un ajustement des impôts.
- Des conséquences identiques s’appliquent aux revenus de remplacements, fonciers et aux pensions de retraite, qui peuvent occasionner des réajustements en cours d’année. En d’autres termes, l’instauration des impôts à la source offre un lot d’avantages non négligeables, à commencer par s’adapter de manière plus efficaces aux évolutions de la vie des contribuables. Le prélèvement à la source s’aligne sur les pratiques de la majorité des pays développés et permeit ainsi à l’administration fiscale de l’Hexagone de se moderniser.